mardi 4 mars 2014

Des présupposés de la pensée classique à leur remise en cause dans la pensée moderne et contemporaine

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  Des présupposés de la pensée classique à leur remise en cause                    dans la pensée moderne et contemporaine.
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 1)   Un besoin de certitude  absolue : Descartes, Spinoza, les mathématiciens et logiciens qui les ont suivi jusqu’à Godel, qui deviendra fou d’être dans la situation de démontrer qu’il est impossible d’y parvenir.

      2)  Le fonctionnement de ma pensée, dont le modèle est la rationalité logique des mathématiques, est adapté au réel ; c’est une nécessité, sinon Dieu qui est l’auteur de l’un et de l’autre ne serait qu’un malin génie cherchant à me tromper; (cf Descartes). Et Galilée écrira:« La mathématique est l'alphabet dans lequel Dieu a écrit l'univers » et « le livre de la nature est écrit en langage mathématique »

    3) Le fonctionnement correct de ma pensée est de passer de l’évidence sensible qui peut me tromper, comme critère de vérité, à l’évidence intellectuelle, que seule la logique en définitive peut me fournir.

Ces présupposés vont être abandonnés dans la pensée moderne et contemporaine:

 1)  je sais désormais que ma connaissance est toujours relative à deux données qui sont changeantes:
               a) les moyens d'observation du réel  dont nous disposons  sont tels que nous ne pouvons prétendre que nous avons accès dès aujourd'hui à tous les phénomènes de la nature, et que nos lois rendent compte de la diversité de tous les phénomènes observables au sein de notre univers, qui d'ailleurs n'est peut-être pas le seul... A ce niveau les connaissances que nous avons - qui ne sont pas rien - nous font de plus en plus ressentir l'étendue de ce que nous ignorons. 
         b) Par ailleurs ces connaissances sont aussi relatives aux outils conceptuels ( concepts, mots...) dont nous disposons pour les formuler. Ceux utiles dans les théories de Newton ne sont pas les mêmes que ceux utilisés par la théorie quantique et le problème que pose la possibilité nouvelle que nous avons d'observer ce que nous appelons les phénomènes mentaux nous met en face justement de la difficulté que nous avons d'en rendre compte avec les concepts et les mots dont nous disposons. 

2)  Rien ne m'assure que le fonctionnement de ma pensée est adapté à la compréhension du réel lui-même; les possibilités techniques qui découlent de mes connaissances ne sont pas en elles-mêmes une preuve de la conformité de la structure de ma pensée à la structure du réel, tant les idées qui vont s'avérer fausses sont souvent très efficaces et ont permis à l'homme de vivre et évoluer; ma raison n'est plus considérée comme créée par Dieu; son émergence se situe dans le cadre d'un processus évolutif et le problème au contraire se pose de la prétention pour elle de pouvoir comprendre la totalité du processus qui lui a donné naissance si tardivement.
 3) enfin la notion d'évidence intellectuelle comme critère de vérité est battue en brèche du fait que tout système déductif repose sur un ensemble d'axiomes de départ dont on sait depuis Godel qu'ils sont indécidables au sein du système déductif lui-même.

                 
                 cf. article "HEPHEMERIDES"  le 28/01/2014
                 cf. article " Les lois de la nature et le libre-arbitre": 
                          en outre :
1) rejet de tout dualisme ontologique:
« Un argument contre le dualisme consiste en l’idée que puisque l’être humain vient à l’existence…en tant qu’entité purement physique ou matérielle, et puisque rien d’extérieur au domaine de la physique ne lui a été ajouté par la suite au cours de son développement alors on doit nécessairement terminer notre développement en tant qu’êtres entièrement matériels. Phylogénétiquement l’espèce humaine a évolué, comme toutes les autres espèces, à partir d’un être monocellulaire fait de matière. Puisque tous les événements ultérieurs conduisant à la formation de notre espèce peuvent être expliqués à travers le processus de mutation aléatoire et de sélection naturelle, la difficulté pour le dualiste est d’expliquer où et pourquoi il aurait pu y avoir l’intervention d’un événement non physique, non matériel dans le processus de l’évolution naturelle…On commence notre existence en tant qu’ovule fertilisé, il n’y a rien de non matériel, ou de mentaliste dans la conception, la formation du blastocyste, du gastrula, et ainsi de suite. Notre développement peut s’expliquer entièrement en termes d’accumulation de matière à travers le processus de nutrition. Alors, d’où pourrait provenir un esprit non physique ? » ( wikipedia, article  « dualism philosophy of mind » ).

2) le concept d'émergence permet de rendre compte de la spécificité des faits mentaux  et de l'existence des systèmes complexes.


« …Un système complexe se compose de nombreux systèmes différents qui interagissent et produisent des propriétés nouvelles. Celles-ci dépassent la somme de leurs parties et ne peuvent se réduire aux propriétés des parties. Un exemple classique qui permet de le comprendre est celui du trafic routier. Si vous examinez les éléments d’une voiture, vous ne pourrez prédire un type de circulation. Vous ne pourrez pas le faire non plus, si vous considérez le niveau plus élevé d’organisation qui est celui de la voiture. C’est de l’interaction de toutes les voitures, de leurs chauffeurs, de la société et de nos lois, de la météo, des routes, des animaux qui s’y aventurent, du temps, de l’espace, et de je ne sais quoi encore que le trafic émerge […]. La caractéristique commune à tous les systèmes complexes est qu’ils présentent une organisation sans qu’un principe organisateur véritablement externe leur soit appliqué. Cela signifie qu’il n’y a aucune instance supérieure, aucun homonculus. » ( Le libre -arbitre et la science du cerveau  de M. Gazzaniga pp.82-83, Odile Jacob ).

3) Le contenu classique du concept de matière est remis en cause par la physique contemporaine. La distinction elle-même "matière-esprit" ne peut plus être considérée comme pertinente qu'au niveau de ma représentation du réel ( faits physiques- faits mentaux); rien ne me dit qu'elle le soit au niveau du réel lui-même. 


« Auparavant on pensait que les objets étaient faits de "substance matérielle". Mais en pénétrant à l'intérieur de la matière, la science a découvert que l'Univers était composé d'atomes et les atomes, de particules... Or, ces particules ne constituent pas une substance matérielle, dite solide, mais des "amas d'énergie en transformation constante."« La théorie quantique nous oblige à considérer l’univers, non comme une collection d’objets physiques, mais comme un réseau complexe de relations entre les diverses parties d’un tout unitaire ». F.Capra

« En définitive, le monde dit matériel, ne serait rien d’autre qu’un tissu complexe d’événements, où les relations se forment, se combinent, et se superposent, déterminant ainsi la trame de l’ensemble. L'Univers apparaît alors comme une véritable toile cosmique où tous les événements seraient interconnectés les uns aux autres... » D. Bohn rejette la fragmentation de la physique newtonnienne et se fonde sur le holisme également présent dans la théorie de la relativité et la physique quantique. L'hypothèse rejette le dualisme, la séparation entre la conscience et la matière…Dans ce modèle, l'esprit et la matière sont perçus comme des projections dans notre ordre explicite de la réalité sous-jacente, l'ordre implicite.

7 commentaires:

  1. "Un système complexe se compose de nombreux systèmes différents qui interagissent et produisent des propriétés nouvelles. Celles-ci dépassent la somme de leurs parties et ne peuvent se réduire aux propriétés des parties. ...
    C’est de l’interaction de toutes les voitures, de leurs chauffeurs, de la société et de nos lois, de la météo, des routes, des animaux qui s’y aventurent, du temps, de l’espace, et de je ne sais quoi encore que le trafic émerge […]"



    Je trouve plus raisonnable de penser que l'émergence de propriétés qui dépasse la somme de leurs partie vient uniquement du "je ne sais pas quoi" qui constitue les parties, ou du "je ne sais pas quoi" qui le constitue en tant que partie .

    Ainsi Il faudra bien quand même admettre qu'il y a du "je ne sais pas quoi" aussi dans ce qui constitue l'humain, alors comment peut on affirmer que "l’être humain vient à l’existence…en tant qu’entité purement physique ou matérielle"

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    1. pourquoi vient "uniquement"? Il peut en venir aussi bien sûr, mais pas obligatoirement seulement . Quant à l'entité .purement matérielle ou physique, c'est effectivement un présupposé de la pensée moderne, plus d'ailleurs que de la pensée contemporaine où le contenu classique du concept de matière et d'ailleurs aussi celui d'esprit sont remis en question.
      bernard le 4/03/2014

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  2. Disons que si on peut constater par les faits qu'un tout dépasse les sommes de de ses parties (j'inclue dans les parties les relations que ces parties entretiennent), aucune hypothèse n'est proposée pour expliquer le supplément constaté .

    La seule explication que je trouve est dans le je ne sais quoi, ou bien alors il faut donner de la consistance a ces relations, et que je sache ( c.f notre discussion de l'atelier philo sur le sujet : "qu'est ce qu'une relation" ) les relations font encore partie de ce "je ne sais quoi" et ont fait l'objet d'assez peu de tentatives de théorisation.

    La vieille séparation corps- esprit a donc au moins l'avantage de nommer ce je ne sais quoi qui ne s'appréhende pas avec les outils de la matière . Reste à savoir ce que c'est, et nos discussions dans ce même atelier philo " quel est la nature des pensées" montre que la chose n'est pas si simple : on dirait qu'il nous manque un outil - ,comme la science peut l'être pour le monde sensitif au sens large - pour appréhender ce "je ne sais quoi"

    Si la science échoue sur ce point, peut être que la philosophie est à même de développer cet outil, car ses instruments sont de la même nature ( pensée, esprit) , à condition bien de ne pas faire l'impasse avec ce genre de tour de passe passe ( constat du supplément, exclusion du je ne sais quoi ou bien impasse sur sa description avec un mot non explicité et très peu débattu : la relation )

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  3. avec du retard je réponds un peu à ton commentaire...Non je ne crois pas que la philosophie ait des moyens spécifiques pour parvenir à une connaissance de ce dont tu parles. Tout homme peut avoir sur le sujet une opinion quelconque, et le philosophe comme les autres. Mais de quel outil particulier à la philosophie, le philosophe dispose-t-il? A mon avis aucun. C'est ce qui me fait dire que si la philosophie interroge tous les discours prétendument ou réellement porteurs de savoirs, elle n'est pas elle-même un discours produisant du savoir. La question sous-jacente est aussi celle là : l'homme est-il assuré de pouvoir tout comprendre de ce réel dont il n'est qu'une élément?
    a suivre.
    Bernard.

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    1. ma réponse à moi-meme est plutôt une suite. Je suis en effet, en interaction constante nécessaire avec ce monde dont je ne suis qu'un élément. En sorte que le point de vue cognitif de mon apport à lui est toujours en correspondance avec d'autres points de vue, dont le point de vue utilitaire. Cela obère peut-être ma capacité à parvenir à une réelle compréhension du monde. A débattre...

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  4. Les outils des mathématiques permettent d'appréhender une réalité "en dessous de sa matérialité" sans sagesse, ou plutôt avec une dimension de la sagesse : celle de la recherche de la certitude. Gageons que la philosophe saura un jour construire ses propres outils "au dessus" des mathématiques, c'est à dire incluant les autres dimensions de la sagesse humaine ( à définir )

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