mardi 11 novembre 2014

UNIVERSALITE



  • L'atelier philo demain soir réfléchira sur le thème :"Y-a-t-il de l'universalité en nous?" Ce thème comporte plusieurs pièges qui tiennent à l'usage souvent très approximatif que l'on fait du terme "universel". A la limite il n'y a qu'un fait qui soit vraiment universel, c'est le fait d'être qui s'applique à tout ce à propos de quoi je peux dire "cela est". Le problème est qu'en dehors de cette proposition je ne peux pas dire grand chose sur ce en quoi consiste le fait d'être...La philosophie a développé une réflexion sur cette difficulté qui consiste en ce que l'on appelle "l'ontologie", ou l'étude de l'être simplement en tant qu'il est un être. Mais il ne m'est jamais donné de faire l'expérience d'un être qui se contenterait d'être. Il est toujours ou ceci ou cela, ce que nous appelons alors non seulement un être, mais un "étant". Alors mon discours peut se diversifier et s'appliquer à ce en quoi consiste tel étant ou tel autre, selon précisément sa façon d'être, dit savamment son statut ontologique... 
  • Mais alors c'est le concept d'universalité qui n'est plus pertinent, ce qui vaut pour tel étant ne valant pas pour un autre. Nous sommes en face cette fois de généralités, propres à chaque type d'étant, non plus en face d'une universalité applicable à tous. . . 
  • Une première tentation à laquelle certains succombent facilement consiste à confondre ressemblance et identité. On passe d'une analogie ou même d'une véritable ressemblance à l'affirmation d'une identité. 
  • Une autre tentation consiste à passer d'un mode d'être à un autre comme si en changeant de mode des activités ou des caractéristiques expérimentées à un niveau pouvaient être transposées telles quelles à un autre niveau où aucune expérience n'a encore été pratiquée ou même est impraticable. L'exemple type d'une telle tentation est celle de l'anthropo-morphisme. Je sais à peu près ce que je veux dire quand je dis que l'homme pense et qu'il souffre car ces deux caractéristiques font partie du champ expérimental de sans doute tout être humain. 
  • Il y a des animaux qui pensent et tous peut-être souffrent. Mais je ne sais pas exactement ce que ressent une mouche, si elle ressent quelque chose, quand je l'écrase sur la vitre. Et je ne sais pas non plus ce que ressent une souris de laboratoire dans les diverses manipulations dont elle est l'objet.
  •  Les végétaux pensent-ils et souffrent-ils?
  • Et qu'en est-il des minéraux? La montagne ressent-elle quelque chose quand je la transforme en carrière? 
  • Interpréter leurs éventuelles pensées et souffrances dans les termes de celles de l'homme et les considérer comme semblables est outrepasser dans ce que je dis ce que je sais réellement.
  • Quant à l'univers lui-même, il y a de la pensée dans l'univers et beaucoup de souffrance, mais l'univers lui-même pense-t-il et souffre-t-il? Cela ne peut-être que d'une manière toute différente de celle dont je sais de quoi je parle quand je parle de la pensée de l'homme et de sa souffrance.
  • Etrangement, mais souvent très fréquemment, surtout dans notre période où l'individualisme sévit et où l'être humain a tendance à se considérer comme le roi de la création, il a tendance à se représenter ce qui vaut pour lui comme valant pour tout être, et ainsi à transformer ce qui relève de ses généralités en une universalité factice. cela lui évite par contre de s'attaquer à ce qui spécifie chaque mode d'être et lui permet d'ironiser sur le caractère parcellaire de toute étude scientifique. Par contre, à moins d'en rester à des abstractions d'ailleurs au sens très incertain, je ne peux donner autrement à mes discours la moindre consistance.


  • ...(a suivre...ce mardi 11 novembre 2014)